08/12/2016

Bataille pour le contrôle des canaux de l’information financière


Le 8 novembre, des milliers de tradeurs dans les salles de marché du monde entier ont eu soudain le même geste d’énervement: leur messagerie instantanée Bloomberg ne marchait plus. Pendant une heure, la panne a été complète. Puis, pendant encore une heure, la connexion est restée intermittente. Certains tradeurs ont pu contourner le problème, utilisant des messageries grand public comme WhatsApp ou osant même une solution révolutionnaire : décrocher leur téléphone. Mais tous ont vu l’un de leurs principaux outils de travail mis à mal.

L’anecdote est venue rappeler l’extraordinaire omniprésence de Bloomberg dans le monde de la finance. Le groupe américain d’information et de données financières est partout, incontournable dans la vie d’un financier: à son réveil, il lui donne les informations de la nuit sur son téléphone portable; dans la journée, il apporte courbes et analyses chiffrées des marchés suivis; et il lui permet de communiquer avec ses clients et ses collègues par le biais d’e-mails et de la messagerie instantanée, surnommée IB (Instant Bloomberg).

Dans les salles de marché, chaque banquier ou tradeur compte entre quatre et huit écrans devant lui. Il s’agit, pour l’immense majorité, de terminaux Bloomberg. Généralement, un écran est consacré aux informations qui tombent, un ou deux autres aux conversations IB, et le reste aux cours des marchés et analyses graphiques. Le tout forme un outil absolument incontournable, qui rapporte une fortune : à raison désormais de 325 000 terminaux à travers le monde, loués chacun autour de 25000 dollars par an, cela fait plus de 8 milliards de dollars de revenus, qui représentent la grande majorité du chiffre d’affaires de Bloomberg. Une véritable vache à lait, créée par Michael Bloomberg en 1981 et qui n’a cessé de grandir, traversant les crises économiques et financières sans coup férir.

CONFLIT D’INTÉRÊTS


Cette domination mondiale n’est cependant pas du goût de tous. En 2013, les journalistes de Bloomberg ont enquêté sur le sort de certains employés de Goldman Sachs en utilisant des données en principe privées : ils ont pu savoir quels banquiers se connectaient au terminal, à quelle heure et où; ils pouvaient même connaître les fonctions que ceux-ci utilisaient. Puis, il s’est avéré que des milliers de messages IB se sont retrouvés sur Internet, consultables par tous. Ces échanges étaient vieux, mais contenaient des informations confidentielles, notamment sur des prix de transactions.

L’alarme a commencé à sonner chez les grandes banques, qui se sont inquiétées de la position inhabituelle de Bloomberg : celui-ci possède à la fois les canaux de distribution de l’information (la messagerie) et la fabrique de l’information (l’agence de presse). Le conflit d’intérêts est évident.

Soucieux de retrouver une certaine indépendance, un consortium de grandes banques a lancé sa propre messagerie concurrente, Symphony. Celle-ci est dirigée par un Français, David Gurlé, qui conserve une pointe d’accent américain à force de vivre et d’avoir grandi à l’étranger – ses parents étaient diplomates. « Notre grande force est que nous sommes neutres, explique-t-il à l’occasion d’un passage à Londres. Nous sommes un simple tuyau, qui doit rester opaque.» Contrairement à Bloomberg, sa société n’est pas juge et partie, estime-t-il. Les grands établissements financiers semblent convaincus : parmi ses investisseurs se trouvent Goldman Sachs, Bank of America Merrill Lynch, Citigroup, Deutsche Bank, BlackRock, la Société générale, Natixis, JP Morgan, UBS...

La société ne propose qu’une messagerie instantanée et n’a pas l’intention de devenir une agence de presse ou un fournisseur de données. Il s’agit simplement de détacher le flux de messages du mastodonte qu’est Bloomberg. Avec 200 employés et un chiffre d’affaires de 20 millions de dollars, Symphony n’est de toute façon qu’une start-up, loin des 19000 employés du géant appartenant à Michael Bloomberg, l’ancien maire républicain de New York (2002-2013). Mais son travail est important : « On construit le réseau routier des circuits financiers », estime David Gurlé.

De prime abord, sa messagerie instantanée n’a rien d’impressionnant. Pour 15 dollars par mois, elle se présente comme les applications de messagerie grand public qu’on trouve en pagaille sur les smartphones. Elle s’en différencie cependant parce qu’elle est cryptée, et qu’elle permet aux établissements financiers d’assurer le respect de la réglementation financière : certains utilisateurs peuvent avoir un accès limité et le personnel chargé de la conformité des règles peut superviser l’utilisation de la messagerie, etc. Mais l’essentiel est ailleurs : si les grandes banques ordonnent à leurs tradeurs de passer par Symphony, au lieu de Bloomberg, ils s’exécuteront.

On n’en est pas là. La start-up compte désormais 130 000 utilisateurs de 110 entreprises différentes, mais ceux-ci continuent pour l’essentiel à se servir d’IB en parallèle. La domination de Bloomberg est loin d’être terminée. Mais, pour la première fois, son quasi-monopole est mis à mal.

03/12/2016

Innova 2016

Au salon innova cette année, j'ai vu de tout. Mais pas encore ca. C'est un salon qui fait référence a l'innovation et aux inventeurs !

Il y avait un stand chinois qui vendait de la crème pour faire grossir les seins des femmes, un autre chinois promettait de rendre la vue meilleure avec un liquide à mettre sur les paupières. Cette année j'ai bien rigoler MDR


Innova 2016
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11/11/2016

Kazakhgate : le double jeu d'Armand De Decker


En 2011, l’ancien président du Sénat est intervenu de manière occulte auprès du ministre de la Justice de l’époque, Stefaan De Clerck, pour améliorer la situation judiciaire du milliardaire belgo-kazakh Chodiev.





Les acteurs de la corruption de la mafia Kazakh





L'avocat et echevin de la commune d'Uccle et sont slogant:"La garantie du respect" ! C'est tout un programme Jonathan Biermann.





La fameuse Léa Wolman, autrement dit la princesse Lea de Belgique qui a touché 25 000 euros pour ca soit disante fondation Fonds d’entraide Prince et Princesse Alexandre de Belgique ...






Quel beau monde que la justice et la rendre depuis des années. C'est hommes vienne en tenue noir et qui vous tienne des leçons a dormir debout du matin au soir et qui condamne-les sans dents et les citoyens du matin au soir 5 jours par semaines. Un magistrat qui fricote et tu touches du pognon de la princesse, ni vu et ni connu, c'est a l'insu de sont pleins grés bien évidemment !

Un magistrat, bien connu du monde de la justice depuis des lustres fait partie de la mafia du Kazakhgate ? Quoiqu'il en soit, il apparaît qu'en 2012, parmi les quelques associations qui ont bénéficié du haut patronage de la Princesse Léa, figure l'ASBL Amitié et Fraternité Scoute (AFS) dont Jean-François Godbille préside le conseil d'administration, comme l'indique le site internet de l'ASBL. En soi, ce don de la princesse Léa à l'association d'un haut-magistrat n'a rien d'illégal.

Sauf que Jean-François Godbille est au parquet général depuis 2002, qu'il a certainement eu connaissance en 2011 de la fameuse transaction pénale concernant le trio kazakh (le parquet est un et indivisible), qu'il a été substitut au parquet financier de Bruxelles avec Patrick Dewolf, le magistrat qui a conclu la transaction pénale le 17 juin 2011. Les deux hommes se connaissent bien. Ils se sont succédé à la tête et partager les places au parquet financier. Au parquet général de Bruxelles, ils étaient, en 2011, tous deux spécialisés dans la même matière. Jusqu'ici rien ne démontre que Godbille ait quelque chose à voir avec la transaction pénale des Kazakhs. On sait juste qu'un avocat général a cosigné le document avec Dewolf, celui-ci devant porter la signature de deux magistrats. Son paraphe apparaît sur la transaction.

Par ailleurs, la date du don de la princesse Léa à l'ASBL scoute coïncide avec le versement de Catherine Degoul au Fonds d'entraide princier. On imagine que les enquêteurs vont scruter les comptes en banque d'AFS et du magistrat lui-même, ainsi que les versements effectués par la Fondation. S'il apparaît que le don correspond aux 25 000 euros mentionnés dans l'enquête, il y aura vraiment de quoi s'interroger. Pour l'heure, le magistrat bénéficie évidemment de la présomption d'innocence contrairement aux citoyens qui eux font l'objet de fuite organisé de la presse et ou la présomption d'innocence est bafouer. Cela dit, en communiquant comme il l'a fait hier et en annonçant que la conclusion de l'enquête était ainsi retardée, le parquet général montre qu'il prend ce nouvel élément pas très fort au sérieux.








L'avocat  Degoul Catherine et les millions de la mafia Kazakh avec en arrière plan la main l'Elysée de Sarkozy.


Catherine DEGOUL


Le contexte: Avec son air de gentil papy en costume, on lui donnerait le bon Dieu en confession. Avocat de profession, Armand de Decker utilise sa fonction publique du Senat et c'est relation comme carnet d'adresses pour le dictateur du Kazakhstan et sa mafia présent en Belgique. En se servant des intérêts belges au profit des intérêts français et il réussira à empoché 750 000 euros de commission sur le compte du peuple belge, et tout cela au nez a la barbe du parlement et de la justice. Belle exploit en 2016 !

Le site d’information Mediapart à pu se procurer une série de pièces des procédures judiciaires belge et française relatives à une affaire de corruption où apparaît le nom d’Armand De Decker (MR). On y découvre qu’en février 2011, le bourgmestre libéral d’Uccle est intervenu auprès du ministre de la Justice de l’époque Stefaan De Clerck (CD&V) afin de plaider en faveur du milliardaire belgo-kazakh Patokh Chodiev. Armand De Decker s’est rendu au domicile courtraisien du ministre en compagnie de Me Catherine Degoul, l’avocate de Chodiev, deux jours à peine après que celui-ci a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Bruxelles pour faux, usage de faux, blanchiment et association de malfaiteurs.

Deux jours plus tard, le libéral bruxellois, toujours accompagné de l’avocate française, s’est présenté au cabinet du ministre pour soutenir la cause du Belgo-Kazakh. Selon les pièces de l’enquête, l’ex-président du Sénat s’est revendiqué de l’Elysée – alors dirigé par Nicolas Sarkozy –, et a expliqué cette intervention occulte par l’intérêt qu’avait la France de mener à bien une transaction aéronautique avec le Kazakhstan. C’est que Patokh Chodiev est un ami et associé en affaires du président kazakh Nursultan Nazarbaïev. Deux jours plus tard, la proposition de loi sur la transaction
pénale, dont bénéficiera Chodiev, est déposée. Lorsque nous l’avons interrogé sur ces rencontres, Stefaan De Clerck a tenu à rappeler qu’il n’a jamais travaillé sur le dossier de la transaction pénale. Mais il confirme que « la question qui était posée par M. De Decker était de savoir ce qu’était l’état du travail sur cette extension de la transaction, et quelles étaient les possibilités ».

Pour mener à bien ces interventions, Armand De Decker a perçu plus de 740.000 euros d’honoraires pour 350 heures déclarées comme prestations d’avocat, prestations qu’aucune pièce de procédure judiciaire ne confirme.

L’ancien président du Sénat Armand De Decker (MR) est bien intervenu auprès du ministre Stefaan De Clerck (CD&V) et du cabinet de la Justice pour tenter d’influer sur le sort judiciaire de son client.

L’enquête franco-belge est accablante : il était financé par Chodiev, et se revendiquait de l’Elysée.

En 2011, afin de préserver les intérêts de la France dans un contrat aéronautique avec le Kazakhstan, l’Elysée de Nicolas Sarkozy est bien intervenu de manière occulte auprès du ministre de la Justice belge de l’époque, Stefaan De Clerck (CD&V), puis auprès de son cabinet afin d’obtenir une amélioration de la situation judiciaire du milliardaire belgo-kazakh Patokh Chodiev. Pour mener à bien ces interventions d’influences, l’ancien président du Sénat et ancien ministre Armand De Decker (MR) s’est réclamé de l’Elysée et a perçu plus de 740.000 euros d’honoraires pour 350 heures déclarées comme prestations d’avocat, prestations qu’aucune pièce de procédure judiciaire ne confirme.
C’est ce qu’établissent, quatre ans après les premières révélations du Canard enchaîné, diverses pièces des procédures judiciaires belge et française qui ont été consultées par le site français Mediapart, et confirmées par des sources belges et françaises approchées par les deux médias. Car une large série de pièces belges ont été versées en juin à la procédure française, dont une vingtaine d’auditions. Une source française proche du dossier se dit impressionnée par la précision de l’enquête belge.

Une visite à Courtrai, chez le ministre
Le plus surprenant porte sur le mode d’influence. Le dimanche 20 février 2011, deux jours après qu’une ordonnance de la Chambre du conseil de Bruxelles ne renvoie les inculpés Chodiev et consorts devant le tribunal correctionnel pour faux, usage de faux, blanchiment et association de malfaiteurs, l’avocate française qui intervenait au nom de M. Chodiev et réglait les honoraires de M. De Decker, Me Catherine Degoul, du barreau de Nice, s’est rendue à Courtrai au domicile de M. Ste- faan De Clerck, alors ministre de la Justice. Cette entrevue avait été obtenue par Armand De Decker, qui a lui aussi participé à la réunion. Tant MM. De Decker que De Clerck nous confirment cette rencontre ; il s’agissait bien d’une démarche liée au dossier Chodiev. Dans sa déposition judiciaire, l’an- cien ministre belge de la Justice Stefaan De Clerck explique : « (...) je ne voulais ni ne pouvais intervenir dans le dossier dont il me parlait. A votre demande, je confirme qu’il s’agit du dossier Chodiev. »

Deux jours plus tard, le mardi 22 février, les mêmes Armand De Decker et Catherine Degoul se sont présentés au cabinet du ministre de la Justice – en l’absence du ministre – pour y jouer à nouveau d’influence. C’est à propos de cette seconde rencontre que les pièces de procédure belges qui ont été compilées à Paris sont assassines: Armand De Decker y est présenté comme s’étant revendiqué de l’Elysée, et avoir expliqué cette intervention occulte par l’intérêt qu’avait la France de mener à bien une transaction aéronautique avec le Kazakhstan.

« Lors de cette visite, déclare en audition judiciaire l’un des collaborateurs de M. De Clerck qui a assisté à la réunion, M. Armand De Decker a précisé qu’il ne venait pas en sa qualité d’ancien pré- sident du Sénat mais bien en sa qualité d’avocat de l’Elysée, tandis que la dame a été présentée comme l’avocate de M. Chodiev. M. Armand De Decker a précisé que l’intervention de l’Elysée était liée à l’octroi d’un marché en matière aéronautique entre le Kazakhstan et la France. (Nous) avons immédiatement expliqué qu’il était exclu que le ministre agisse de la sorte, compte tenu de la législation belge en vigueur et du principe de séparation des pouvoirs. »

C’est très exactement ce que soupçonnait depuis le premier jour le Canard enchaîné : une intervention de la France en faveur du Belgo-Kazakh Patokh Chodiev, ami et associé en affaires du président kazakh Nursultan Nazarbaïev, dans le cadre de rétrocommissions liées à la vente de 45 hélicoptères Eurocopter au Kazakhstan. Un contrat aéronautique de plusieurs centaines de millions d’euros, inclus dans un marché industriel franco-kazakh plus vaste encore, pesant 2 milliards d’euros.

Confronté à ces informations, M. De Decker ne nie pas cette démarche surprenante auprès du cabinet du ministre de la Justice, mais nous dit : « Je n’ai sûrement pas invoqué l’Elysée, sûrement pas. Je ne peux pas l’imaginer.» Peut être que lui ne peut pas l'imaginer, mais dans la réalité cela a bien eu lieu. Deux auditions judiciaires de très haut niveau le contredisent pourtant.

Sur quoi portaient ces visites d’influence? Sur de simples problèmes de procédure – auquel cas le ministre n’est pas compétent ? C’est ce qu’affirmera Catherine Degoul. Ou s’agit-il d’intervenir sur la future loi belge élargissant la portée de la transaction pénale, qui sauvera en définitive Chodiev et consorts ? Ou de trouver la manière d’en tirer le meilleur profit ? Rappelons que les visites chez le ministre et au cabinet datent des 20 et 22 février, alors que le dépôt de la proposition de loi se produit deux jours plus tard, le jeudi 24 février.

Concernant la visite au cabinet, Armand De Decker nous dit : « Je ne sais plus sur quoi cette visite portait. Cela ne portait pas sur la loi de transaction pénale. Car je vous rappelle que je n’ai appris le futur changement de loi que plus tard, dans le bureau de l’avocat général. »

Un cadeau inespéré pour les Kazakhs

Degoul et De Decker disent tous deux qu’ils ignoraient à ce moment que la loi allait être modifiée – au bénéfice de facto de leur client. Degoul dit en audition : « Si je me suis rendue au cabinet du ministre, cela ne peut pas être pour des problèmes de transaction pénale puisqu’à l’époque je ne connaissais même pas le texte.»
Cette affirmation est contredite par un document rare que Mediapart sait procuré: il s’agit du mandat obtenu par Me Degoul et signé par ses clients kazakhs dans la soirée du 15 mars 2011. Négocié bien avant cette date et rédigé en anglais, il fixe la stratégie judiciaire que doit suivre Me Degoul. En substance, les Kazakhs n’osent même pas rêver d’une transaction pénale: ils se contenteraient, disent-ils à leur avocate, d’une « suspension du prononcé» – en français dans le texte. Mais ils admettent que Me Degoul les a dûment briefés : «Vous nous avez informés d’un brouillon de nouvelle législation sur la transaction qui pourrait être obtenue auprès du bureau du procureur qui dispenserait de la nécessité d’une approbation de la transaction par un tribunal. » Me Degoul semblait donc parfaitement informée. Et les Kazakhs ne s’attendaient pas au cadeau que leur ferait en juin 2011 la justice belge !

Pourquoi révéler cette enquête aujourd’hui? Parce que des soupçons très lourds pèsent désormais sur Armand De Decker et Catherine Degoul, déjà inculpée pour corruption d’agents publics étrangers et blanchiment en bande organisée dans le cadre de l'enquête française. Selon nos informations, l’avocate a été auditionnée le 2juin dernier dans les locaux du pôle financier du tribunal de Paris, en présence des juges d’instruction français Guillaume Daïeff et Roger Le Loire, à la demande de la justice belge. Elle a été priée de répondre aux questions très précises d’un procureur belge (Mme le substitut Lorraine Pilette, alors en charge du dossier), et du policier belge qui mène l’enquête à l’Office central pour la répression de la corruption (OCRC). La teneur exacte de l’entretien ne nous est pas entièrement connue, mais elle porte sur les étonnantes rencontres des 20 et 22 février et sur leur justification réelle.

Catherine Degoul semble avoir été ébranlée par cette affaire. Dans les semaines qui ont suivi son audition, Mme Degoul va quitter le Barreau de Nice, quitter la profession d’avocat et signaler aux magistrats instructeurs français qu’elle n’a plus d’argent pour assurer sa défense. Elle ne souhaite plus avoir d’avocat du tout! Contactée via son ancien conseil, Mme Degoul n’a pas souhaité réagir à nos questions.

Aujourd’hui, l’ancien président du Sénat Armand De Decker semble bien seul après s’être laissé emporter dans un tourbillon qui va probablement l’écraser. Mais il n’est pas exclu que d’autres acteurs tombent sous le coup de l’enquête.

De Decker était le sous-marin de l’Elysée


Stefaan De Clerck a été approché de curieuse façon par De Decker : une visite à domicile pour influer sur un dossier particulier, le dossier Chodiev.
900.000 euros d’honoraires... et une étrange enveloppe de 25 000 euros pour Son Altesse LEA de BELGIQUE

Au départ de l’affaire de corruption publique qui accable aujourd’hui Armand De Decker, se trouve une enquête financière française qui va transiter par la cellule belge anti-blanchiment (Ctif, Cellule de traitement des informations financières) puis être transmise au Parquet. Informée des volumes réels des transferts de fonds intervenus entre l’avocate française Catherine Degoul et ses interlocuteurs belges, jamais la Ctif ne s’arrêtera au «un peu moins de 500.000 euros d’honoraires » qu’admettra avoir perçu Armand De Decker dans le dossier Chodiev : deux versements effectués en octobre et décembre 2011 totalisent déjà à eux seuls plus de 620.000 euros.

Qu’a réellement versé Mme Degoul ? Les chiffres connus aujourd’hui font état de deux fois 1,5 million d’honoraires pour les deux avocats belges qui sont manifestement intervenus dans la pro- cédure judiciaire des clients kazakhs. Ces montants ne sont pas mis en cause, ils s’appuient sur les relevés horaires des avocats, sur des interventions effectives en procédures, la signature de conclu- sions, etc. Du travail régulier d’avocats intervenant dans la procédure et en au- diences.

740.000 euros pour 350 heures, soit 2.144 euros de l’heure

Un autre groupe de versements concerne M. Armand De Decker. Les relevés français évoquent plus de 740.000 euros entre les mois de décembre 2010 et décembre 2011. Mais là, pas de relevés horaires, des interventions qui ne figurent ni dans les conclusions déposées ni dans les procès-verbaux d’audience.

Plusieurs explications sont possibles. D’abord, comme le répète avec constance Armand De Decker, ces montants ne couvriraient pas le seul dossier Chodiev. Il y aurait dans ces 740.000 euros les honoraires liés à deux autres dossiers amenés par Mme Degoul, à savoir des interventions en faveur de la Française Florence Cassez, alors détenue au Mexique, et du criminel de guerre congolais Jean-Pierre Bemba, alors en attente de jugement à La Haye (Notons que dans le premier dossier, Armand De Decker nous confirme avoir démarché non plus le ministre de la Justice mais le ministre des Affaires étrangères du gouvernement Leterme II, Steven Vanackere (CD&V) : autre enquête en vue ?).

Mais, interrogée par les juges français sur le dossier Chodiev, Mme Degoul a confirmé 700 à 750.000 euros versés à Armand De Decker : « Hé ben, c’est hyper-correct! (...) cela fait un très bon paiement, mes confrères ont perçu 1,5 million d’euros chacun, Me De Decker 700 ou 750.000 euros. » Qu’en penser ?

Le nom de l’avocat belge est-il absent des documents judiciaires et de la comptabilité d’avocat parce que, comme l’a affirmé il y a bien longtemps Mme Degoul, M. De Decker « ne devait pas appa- raître»? Armand De Decker nous affirme avoir «travaillé aux conclusions que je relisais, je donnais mon avis », mais ne les signait pas! Il rappelle d’ailleurs avoir «été s’expliquer chez le bâtonnier, qui a bien compris que mes honoraires étaient normaux. » Dont acte. Seul le bâtonnier semble avoir vu un relevé horaire, de 350 heures. 350 heures pour 740.000 euros, cela représente tout de même 2.114 euros de l’ heure.

Par ailleurs, les Français ont levé deux autres flux financiers émanant de Mme Degoul. Le premier est connu, il concerne le travail presté par l’avocat Jonathan Biermann, par ailleurs échevin des travaux publics (MR) d’Uccle, la commune dont Armand De Decker est bourgmestre. Me Biermann défendait l’une des co-inculpées du dossier Chodiev, Mme Natalia Kajegueldina, épouse de l’ex-Premier ministre du Kazakhstan. Ses honoraires se montaient à 160.000 euros curieusement morcelés, mais que Me Biermann ne commentera pas en y opposant le secret professionnel.

25.000 euros versés au Fonds d’entraide Prince Alexandre

Le dernier flux, lui, est déconcertant. Il s’agit d’environ 25.000 euros, qui partent en janvier 2012 du compte français de Mme Degoul vers le compte du Fonds d’entraide Prince et Princesse Alexandre de Belgique, à Rhode St Genèse. Il s’agit d’une fondation caritative dont l’administratrice n’est autre que Son Altesse Royale Princesse Léa de Belgique. Les motifs de ce mouvement financier ne sont pas clairs aux enquêteurs français, qui retiennent qu’il s’agirait d’une « demande d’Armand De Decker » et n’ont pas trace d’une audition d’un membre de la famille royale belge. Lors de cette fameuse audition du 2 juin, Mme Degoul se borne à charger Armand De Decker, affirmant qu’il lui aurait dit : « Ce serait peut-être bien que tu fasses quelque chose pour le royaume de Belgique. » C’est sur PV.

« Elle raconte des conneries intégrales, nous répond Armand De Decker. Ce qui s’est passé, c’est ceci : (Et l’avocat Armand De Decker d’expliquer une péripétie privée liée à Léa de Belgique.) Voilà. Il y a seulement eu un contact entre Léa de Belgique et Mme Degoul. Ensuite, moi je n’ai pas eu connaissance qu’un montant était versé. Je ne l’ai su qu’après.

-Donc, rien à voir avec vos activités ou vos honoraires ?

–En rien du tout. Il y a eu une rencontre entre elles deux, c’est tout. »
La fondation n’a pas donné suite à notre demande d’éclaircissement. Mais curieusement la police n'iras jamais demandé des comptes à la princesse, vu la royauté et le nom en jeux et l'entregent de la monarchie, nous allons pas les déranger pour s'y peux ! ..


L'Ex-avocat général Patrick de Wolf 
nouvel acteur, a compléter

08/11/2016

L’Amérique impose son droit sur le reste du monde

Les Etats-Unis font respecter leurs normes juridiques même en dehors de leurs frontières, au grand dam des entreprises européennes. Une mission d’information parlementaire francaise dénonce cette situation.







L'Amérique, dit-on, sort affaiblie de huit années de présidence de Barack Obama. Est-ce bien sûr? Les entreprises européennes n’ont jamais eu aussi peur d’elle. Peur de violer ses législations en matière de corruption internationale, d’embargos, de blanchiment d’argent, et d’encourir des sanctions qui se chiffrent par milliards de dollars. Peur de se voir soumises à son invincible procédure pénale. Peur de se faire sortir manu militari du plus riche marché mondial. Peur de se faire espionner par ses grandes oreilles (la NSA et la CIA), et de voir leurs clients et leurs  secrets de fabrique prestement siphonnés. Après ses soldats et ses tanks, son Coca, ses Levi’s et ses films, ses normes comptables et ses exigences de retour sur fonds propres, ses systèmes d’exploitation et son Internet Protocol, sans oublier, bien sûr, Google, Apple, Facebook, Twitter et les autres – ces outils qui ont viralisé le monde –, voilà que l’Amérique nous impose son droit. Un droit qui se réclame de la morale protestante et qui s’impose dans le droit international sans quasiment susciter de résistance. Au point que grands patrons et responsables politiques évoquent aujourd’hui un « abus de pouvoir ». Cela a conduit les députés Pierre Lellouche (LR) et Karine Berger (PS), tous deux plutôt favorables à l’Amérique, à mener une mission d’information sur l’extraterritorialité de la législation américaine, dont le rapport a été publié le 5 octobre. Avec, en filigrane, cette question : les Etats-Unis utilisent-ils leur droit comme une arme pour étendre leur pouvoir sur la planète, au détriment du droit international et de la souveraineté des Etats ?

« SÉCURITÉ NATIONALE »

En règle générale, le droit pénal d’un Etat s’applique aux faits commis sur son territoire. Mais le législateur peut élargir les compétences pénales de ses juridictions à des faits commis à l’étranger. Les Etats-Unis, comme la France d’ailleurs, ont de longue date étendu leur autorité hors de leurs frontières pour des faits ayant des effets sur leur sol, ou commis par des nationaux à l’étranger, ou encore portant atteinte à leur «sécurité nationale». Ce dernier motif est régulièrement invoqué pour voter les régimes d’embargo contre les « Etats ennemis », dans une acception qui s’est considérablement élargie avec le Patriot Act de 2001: la loi visait aussi «le blanchiment d’argent servant [...] au financement du terrorisme menaçant non seulement la sécurité des Etats-Unis, mais aussi tout le système économique et financier mondial dont dépendent la prospérité et la croissance ». De quoi rendre la compétence des juridictions américaines universelle.

Au début des années 2000, et plus encore depuis la crise des subprimes, les autorités américaines se sont érigées en gendarme vis- à-vis d’entreprises étrangères pour des faits commis hors de leurs frontières. Elles ont durci à leur encontre l’application de lois anciennes destinées à lutter contre la corruption internationale, le blanchiment d’argent d’origine criminelle et les pratiques mafieuses. Pour établir leur compétence, elles ont élargi les liens de rattachement à la législation américaine: qu’il s’agisse, dans les affaires de corruption, de sociétés cotées ou émettrices à Wall Street, comme Alcatel-Lucent, Alstom, Technip et Total, poursuivis sur la sincérité de leurs comptes; de sociétés ayant une filiale sur le sol américain, comme Alcatel-Lucent et Alstom; ou de sociétés dont les mails mentionnant les faits incriminés ont transité par des serveurs localisés aux Etats- Unis, comme Magyar Telekom, en 2011.


Dans les affaires de violation d’embargo, comme celle de BNP Paribas, accusé d’avoir financé depuis la Suisse des opérations avec des acteurs basés à Cuba, en Iran, au Soudan et en Libye, les autorités ont invoqué l’existence de transactions en dollars ayant transité par la chambre de compensation Swift, située sur le territoire américain. Ainsi le rattachement territorial apparaît-il de plus en plus ténu. Jusqu’à disparaître quand, en 2010, le Congrès vote le Fatca (Foreign Account Tax Compliant Act), qui contraint les banques étrangères dans le monde entier à livrer les informations nominatives sur leurs clients américains sans limite de territorialité.

Toutes nos données numériques étant stockées sur des serveurs américains, échapper à la loi américaine paraît difficile. D’autant que le Department of Justice (DOJ) a mis en place un dispositif de poursuites qui se révèle, avec les années, d’une redoutable efficacité. Depuis la loi Dodd-Frank de 2010, les autorités reversent aux lanceurs d’alerte entre 10 % et 30 % des sanctions. Et pour monter des dossiers sur les entreprises ciblées, les différentes agences ou institutions, à savoir la SEC (Securities and Exchange Com- mission), la Réserve fédérale, l’IRS (Internal Revenue Service), l’OFAC (Office of Foreign Assets Control), le département des services financiers de l’Etat de New York, mais aussi la CIA et la NSA, travaillent en task force et se répartissent les amendes récoltées. Les Etats- Unis auraient même mis en place en 2009 un système de suivi en temps réel des transactions en dollars dans le monde.

SANCTIONS RECORD

Surtout, le département de la justice a étendu la procédure pénale négociée à tous ces domaines où il entend faire valoir son droit, en « proposant » aux entreprises visées soit de coopérer, soit de prendre le risque dévastateur d’un procès. En clair, pour suspendre les poursuites judiciaires et pour qu’elles puissent continuer à travailler aux Etats-Unis, les entreprises visées doivent s’engager à faire réaliser à leurs frais une enquête interne approfondie sur les faits présumés, à en communiquer les résultats aux autorités, à s’acquitter d’une « amende négociée » et, enfin, le plus souvent, à accepter la nomination d’un contrôleur interne. Par cette « procédure négociée » qui écarte la menace administrative du retrait d’une licence bancaire ou du droit de travailler aux Etats-Unis, les entreprises renoncent à se défendre devant un juge.

Ce dispositif est si efficace qu’il a permis au département de la justice de prononcer des sanctions record à l’encontre de sociétés européennes, qui se chiffrent en milliards de dollars. « Les différentes administrations judiciaires américaines sont devenues de véritables chasseurs de primes qui cherchent à se financer sur le résultat de leurs poursuites, dénoncent Pierre Lellouche et Karine Berger. Elles vont là où elles rencontreront le moins de résistance, et visent notamment les concurrents des entreprises américaines.»

Depuis 2008, les entreprises européennes ont versé 6 milliards de dollars (5,4milliards d’euros) aux Etats-Unis pour violation de la loi anticorruption; et, depuis 2009, les banques européennes se sont acquittées de 16 milliards de pénalités pour non-respect des sanctions économiques imposées par Washington. Sans compter les sanctions pour les autres affaires... « Un véritable prélèvement sans contrepartie sur les économies européennes et le niveau de vie de leurs citoyens », dénoncent les députés.

La Chine se barricade derrière une muraille

sur son blog, l’avocat dan harris, basé à Seattle, explique que son cabinet reçoit presque chaque mois des demandes de représentants de sociétés américaines souhaitant faire exécuter un jugement qui a condamné une entreprise chinoise. M. Harris refuse de se saisir de la plupart des dossiers, qui n’ont aucune chance d’aboutir. Et pour cause: la Chine refuse de faire appliquer les jugements américains. Or, comme les sociétés américaines prennent souvent soin de stipuler en amont dans leurs contrats que tout contentieux se réglera devant une cour des Etats-Unis, le client lésé se retrouve sans recours.

La deuxième puissance mondiale voit l’omniprésence du droit américain comme un élément de la domination de son grand concurrent stratégique. Un moyen d’interférence qu’il s’agit de bloquer. L’opposition de la Chine à l’application des règles américaines relève autant de son ambition de devenir un jour numéro un que de la protection opportuniste de ses entreprises. C’est d’ailleurs un des facteurs qui la poussent à promouvoir l’utilisation du yuan dans les échanges internationaux : la possibilité pour les Etats-Unis d’intervenir sur les transactions en dollars, qui remontent in fine à la Réserve fédérale américaine, est un levier de contrôle pour Washington. Intolérable pour Pékin.

Les arguments à opposer ne manquent pas, et l’ambiguïté du droit chinois contribue amplement à rendre la forteresse imprenable. Alors que les scandales de comptes truqués d’entreprises chinoises cotées à New York se sont multipliés, la justice américaine se trouve démunie. Lorsque le régulateur boursier américain a demandé aux branches chinoises des quatre grands cabinets d’audit que sont EY, PWC, Deloitte et KPMG de lui transmettre les comptes de ces entreprises, les « Big Four » ont refusé. A leurs yeux, ils auraient risqué de divulguer ainsi des « secrets d’Etat » chinois et d’enfreindre le droit de l’empire du Milieu. Malgré des poursuites engagées en 2012, les quatre grands préféreront signer, en 2015, un compromis et verser 500 000 dollars chacun.

Aucun pays exempté

Ces barrières limitent le nombre de procédures engagées par la justice américaine contre les entreprises chinoises. Le gouvernement américain ne renonce toutefois pas à poursuivre les entreprises chinoises, surtout lorsque celles-ci enfreignent les sanctions imposées par Washington à ses ennemis. La diplomatie américaine a ainsi annoncé en septembre qu’une enquête était ouverte contre une société du nord-est de la Chine, Hongxiang, suspectée d’avoir contribué au programme nucléaire de la Corée du Nord. Les Etats-Unis peuvent faire pression dès lors que des dollars ont transité par des comptes américains ou par des banques ayant des intérêts sur leur territoire. Le coordinateur de la politique de sanctions au sein du département d’Etat, Daniel Fried, avait prévenu le 28 septembre : « Nous enquêtons. Il n’y a pas de limites et pas de pays ou de sociétés exemptés par le gouvernement. Nous allons où les preuves nous mènent. » Et de préciser ce vœu pieux : « Les entreprises chinoises ne sont pas hors limites. »




07/10/2016

Quand l'autorité supplante la compétence


Leadership


Lorsque nous choisissons des leaders, sommes-nous trop enclins à confier les rênes à des gens qui dégagent de la confiance et de l’autorité ? Devrions-nous accorder plus d’attention à l’expertise technique – au savoir spécialisé requis pour accomplir réellement ce que l’on attend d’eux ?

Une nouvelle recherche suggère que la réponse est oui. Dans une expérience menée en laboratoire, des chercheurs ont divisé un groupe de 294 étudiants en équipes de trois à cinq personnes pour travailler sur un scénario de survie de personnes perdues dans le désert. On a demandé à la moitié des équipes de travailler ensemble mais on ne leur a pas précisé s’il fallait choisir un leader. On a demandé aux autres de choisir un leader pour gérer les discussions et pour prendre des décisions en cas de désaccords. On a demandé, de manière individuelle, et collectivement, aux membres de chaque équipe de classer par ordre d’importance 12 objets, dont un couteau, un kit de première urgence et une carte. Au bout de dix minutes de ce travail, les équipes ayant un leader ont reçu un retour sur la manière dont les listes individuelles et collectives s’alignaient avec les choix des experts des contrées sauvages, et elles ont ensuite été autorisées à choisir de nouveaux leaders.

Quand les listes finales des équipes ont été comparées, on s’est aperçu que les groupes avec les experts les plus capables (c’est-à-dire les leaders dont les classements individuels se rapprochaient le plus de ceux des experts) avaient réalisé les meilleures performances, suivis par les équipes sans leaders. Les équipes les moins performantes étaient celles dirigées par des personnes dont les tris d’objets avaient peu de choses en commun avec les choix des experts. Ces résultats ne sont pas surprenants. Mais quand les équipes ont choisi de nouveaux leaders après avoir reçu un feed-back sur les listes préliminaires de chacun, seuls 55% des groupes ont sélectionné les membres les plus compétents de leurs équipes. Les autres ont choisi des gens qui étaient plus grands ou plus bavards ou qui dégageaient plus de confiance que leurs coreligionnaires – c’est-à-dire des gens qui semblaient avoir de l’autorité.

L’étude a aussi étudié la relation entre les qualités de leadership et la performance dans des équipes enquêtant sur des fraudes dans une compagnie financière danoise. Les résultats de terrain ont confirmé la recherche menée en laboratoire : des équipes avec des leaders qui étaient considérés comme réelle- ment compétents tendaient à accomplir un meilleur travail.

Les chercheurs disent que leur découverte montre un désintérêt alarmant pour l’expertise lorsque l’on choisit des leaders. Leur étude conforte un travail, mené par David Dunning et Justin Kruger, de l’université Cornell, qui démontre que les étudiants de premier cycle universitaire, reconnus pour ne pas être à la hauteur sur différents tests (tels que le raison- nement logique et la grammaire) suresti- maient radicalement leur propre expertise, alors que les étudiants les plus compétents sous-estimaient la leur. La leçon à retenir : ceux qui se voient comme des experts et qui dégagent le plus de confiance pourraient être les personnes dont l’expertise mérite le plus d’être remise en question.

« Ne vous laissez pas tromper par le pouvoir de persuasion ou par l’apparence de l’autorité, conseille l’un des chercheurs, le professeur Lindred Greer, de l’université Stanford. Priorité à la compétence. »

01/10/2016

3 jours en prison

Investisseur étranger

Voila comment la Belgique remercie un investisseur albanais qui crée de l’emploi chez nous....


"Je me bats pour les gens qui veulent bosser". Originaire d’Albanie, Agim, 43 ans, a bien failli s’étrangler à la lecture de cette récente déclaration de notre secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, Theo Francken (N-VA). Depuis que la Belgique est gouverné par des extremistes et des nationaliste, plus rien ne tourne rond.
À cause d’un imbroglio administratif, Agim, lui, on l’a interpellé et envoyé en prison à l’issue d’un contrôle de l’ONSS dans l’épicerie fine qu’il a ouverte à deux pas de la Grand-Place, rue du Midi : Le Comptoir des Saveurs. La police et l'administration n'ont rien voulu savoir, pour lui c'etait direction la case frigo !

Manuel pour licenciement dans les entreprises

Schema de fonctionnement pour degager la plebe de votre entreprise


Notre pays et les politiques pour lesquels vous votés permette aux entreprises de ne pas payer d'impôt en Belgique alors quel font des bénéfice depuis des dizaines d'années. La Belgique est un paradis fical pour les entreprises étrangères. Chaque année vous enlisez les même mafieux en politique qui permette aux entreprises de licencier les employés comme quand on tire une chasse d'eau pour évacuer la merde a la toilette.
Les schémas suivant permettront aux entreprises et aux citoyens de comprendre le fonctionnement de la loi Renault ....



Licenciement




Licenciement







30/09/2016

Menace dans les affaires pour les avocats


SERVICES JURIDIQUES EN LIGNE : LES «LEGAL TECH», UNE MENACE POUR LES AVOCATS?
La plateforme américaine Rocket Lawyer débarque en Europe. Ce nouveau géant de la « legal tech » est occupée à ubériser des pans entiers du droit. En Belgique, quelques start up commencent à se positionner sur ce nouveau créneau.



Legal tech



Déjà installée en Grande-Bretagne, la start-up californienne Rocket Lawyer déboule en Europe continentale. Elle déploiera ses services en France, aux Pays-Bas et en Espagne, avant de s’étendre dans d’autres pays européens. Lesquels? «Ce n’est pas encore tranché», répond Christophe Chevalley, directeur général de Rocket Lawyer Europe. L’entreprise, qui a déjà levé plusieurs dizaines de millions de dollars depuis sa création en 2008, auprès d’investisseurs comme Google Ventures et Morgan Stanley, occupe environ 200 personnes, dont une vingtaine désormais en Europe. Sa stratégie est de s’implanter localement en joint-venture avec un acteur juridique: en France, il s’agit du groupe d’édition ELS, qui héberge notamment Larder, premier éditeur juridique en Belgique.
Rocket Lawyer propose des documents juridiques (statuts d’entreprise, pactes d’actionnaires, contrats de travail, reconnaissances de dettes, contrats de fourniture de services, etc.) et du conseil en ligne à prix cassés. Aux Etats-Unis, un abonnement mensuel donnant accès à l’ensemble des documents coûte 40 dollars. Autant dire que ce genre de service fait frémir les avocats. Mais les dirigeants de Rocket Lawyer veulent à tout prix rassurer les professionnels du droit: «Les avocats ne sont pas des concurrents, mais des partenaires», assure Christophe Chevalley. Le site s’entoure en effet d’avocats qui exercent une mission de conseil, complémentaire au téléchargement de documents. Après un premier contact gratuit, l’utilisateur qui souhaite approfondir certaines questions devient client direct de l’avocat. Ce dernier ne doit rien reverser à Rocket Lawyer, qui bénéficie grâce à la présence de professionnels sur son site d’une forme de légitimité juridique.

«La plupart des avocats sont conscients qu'il faut moderniser la profession.»

Ogre de la legal tech, Rocket Lawyer débarque en France sur un marché où foisonnent les initiatives juridico-numériques, comme LegalStart, actif sur le même créneau que son nouveau concurrent américain, ou encore Captain Contrat (modèles de contrats), Weclaim (actions collectives), Guacamol (création de sociétés, etc.). En Belgique, les initiatives sont encore peu nombreuses. Mais elles existent. Et elles commencent à agiter le petit monde du droit.

Un contrat personnalisé en 15 minutes

Créé en février dernier, la start-up bruxelloise Lawbox propose elle aussi des documents juridiques à télécharger. Le service se destine principalement aux entrepreneurs et aux petites entreprises. «Les PME ont des difficultés d’accès aux services juridiques. Nous leur proposons une solution rapide et bon marché. En 15 minutes, ils peuvent confectionner un contrat personnalisé», explique Thibaut Roberti, CEO de Lawbox. La start-up lance cette semaine une nouvelle version (bêta) de son site internet, qui donne accès à une centaine de documents conçus par des avocats: contrat de cession d’action, clause de protection de propriété intellectuelle, contrat de location pour un logement Airbnb, etc. Le service fonctionne soit à l’achat unique (49 euros par document téléchargé) soit sous forme d’abonnement (99 euros par mois avec un appel à un avocat). Si nécessaire, le client peut contacter un avocat pour un conseil personnalisé (35 euros les 20 minutes).
Thibaut Roberti vante le caractère bon marché de ses services : 50 euros pour des conditions générales de vente, quand un avocat peut les facturer 500 euros, sou
ligne-t-il. Mais il se défend de vouloir ubériser le secteur : « Lawbox ne veut en aucun cas être concurrent aux avocats. Nous n’avons d’ailleurs aucune compétence juridique, précise le CEO de Lawbox. Nous mettons à disposition un outil permettant aux avocats de proposer leurs services de rédaction de contrat à un prix beaucoup plus compétitif. Nous leurs achetons les modèles et ils reçoivent des royalties sur les ventes de ceux-ci. » Pour déployer ses services, l’entrepreneur souhaite développer des partenariats avec d’autres acteurs (compagnies d’assurances ou mutuelle par exemple), qui pourraient proposer sa plateforme à leurs clients comme option complémentaire. Le CEO de Lawbox assure ne pas avoir reçu de remarques négatives de la part d’avocats: «La plupart des avocats sont conscients qu’il faut moderniser la profession», souligne-t-il.

Opérateurs low-cost

Pourtant, une certaine méfiance semble régner dans la profession autour de ces nouveaux outils en ligne. Associé chez Philippe & Partners, Jean-François Henrotte est président du groupe de travail «avocat augmenté» créé au sein d’Avocats.be. Il ausculte avec attention l’arrivée de ces acteurs alternatifs: «Le risque avec ces opérateurs low-cost, c’est que la déontologie s’érode. Pour répondre à ce nouveau modèle, nous devons développer nos propres services, avec la valeur ajoutée de l’avocat», estime Jean-François Henrotte. C’est ainsi que «Plus aucun avocat ne fait du bail.
Mon concurrent, c'est le bail papier.» Régis de Boisé, fondateur de LeBonBail.be
le barreau de Liège a créé un site permettant de télécharger gratuitement des modèles de contrat et d’entrer en contact en ligne avec un avocat. Un tiers du barreau de Liège est déjà inscrit sur la plateforme, qui comptabilise plusieurs centaines de consultations par an.
Les avocats tentent donc de se mobiliser pour contrer l’émergence de start-up du droit généralement pilotées par des entrepreneurs numériques plutôt que par des juristes professionnels. Mais ils auront sans doute du mal à freiner la créativité des legal tech. Plus spécialisée que Lawbox, LeBonBail.be fournit, comme son nom l’indique, des contrats de bail personnalisés. Le site promet de réaliser un contrat de résidence principale en dix minutes grâce à un formulaire dynamique. Il peut même s’occuper de l’enregistrement du bail via un simple envoi par e- mail. Le service est entièrement gratuit.

LeBonBail.be se rémunère via des partenariats noués avec des assurances, des sociétés de déménagement, des fournisseurs de gaz ou d’électricité... qui sollicitent les parties après signature de l’acte. En Belgique, la start-up clôture une douzaine de contrats par jour. Elle est déjà active en France et aimerait mettre un pied en Allemagne. LeBonBail.be fonctionne sur un modèle de marque blanche, intégrée comme option sur des sites liés à l’immobilier. Les principaux utilisateurs sont des agents immobiliers, mais le site est aussi fréquenté par des particuliers, et même des notaires. S’il est bien sur le créneau de la legal tech, Régis de Boisé, fondateur de la start-up, assure qu’il ne mange pas le pain des avocats: «Plus aucun avocat ne fait du bail. Mon concurrent, c’est le bail papier », avance l’entrepreneur.

Automatisation du droit

Cela fait effectivement bien longtemps que les professionnels du droit ne s’occupent plus de toute une série d’opérations « mineures ». A l’heure de signer un bail ou autre « contrat-type », beaucoup de particuliers vont à la pêche aux documents sur Google. C’est sur ce marché « parallèle » qu’un acteur comme Le Bon Bail va chercher ses clients. Rocket Lawyer ou Lawbox, qui proposent une plus grande panoplie de services, même s’ils restent relativement basiques, se retrouveront plus facilement en concurrence avec des avocats généralistes. Mais les plus grands cabinets, qui ont abandonné depuis longtemps ce type de produits, ne sont pas concernés. Du moins pas encore.
La numérisation de toute une série de tâches effectuées par les avocats est en effet en cours. D’après une enquête du Boston Consulting Group, les legal tech pourraient bientôt réaliser entre 30% et 50 % des missions confiées actuellement à des avocats «juniors». Du coup, les cabinets d’affaires cherchent à internaliser le développement de ces nouvelles solutions de numérisation, afin de les proposer à leurs clients: «Nous nous intéressons de près à l’automatisation, avance Henk Vanhulle, managing partner de Linklaters. Au niveau du groupe, nous investissons des sommes importantes dans des logiciels de pointe permettant de traiter de grandes quantités de documents en un temps record. » L’intelligence artificielle, qui progresse à grands pas, pourrait prochainement bouleverser encore plus profondément le secteur juridique.


18/06/2016

BUSINESS AS USUAL

Alors que l’économie britannique ralentit depuis plusieurs mois, les investisseurs attendent la fin de l’incertitude liée au vote du 23 juin. Les conséquences économiques d’un Brexit restent pourtant très floues.

Alors que débute la saison estivale britannique, les grands patrons voudraient paraître sereins. Lors de l’inauguration, le 23 mai, de l’exposition florale de Chelsea, le premier grand événement d’une série de festivités qui se poursuivront avec les courses équestres d’Ascot, le géant de l’acier Lakshmi Mittal a croisé dans le flot des invités le magnat des médias Rupert Murdoch et un nombre incalculable de grands noms de la City de Londres. Malgré les sourires, les tenues de gala et le crépitement des flashs, dans les allées fleuries, les regards en coin et les discussions murmurées des banquiers, assureurs et dirigeants de hedge funds ont trahi leur inquiétude : le référendum du 23 juin affecte déjà leur activité. Comme nous l’a récemment expliqué un développeur immobilier désireux de rester anonyme, « de nombreux projets immobiliers importants, prêts à être lancés, ont été stoppés net depuis l’annonce de la date du référendum en début d’année. Les investisseurs les ont rangés dans leurs tiroirs en attendant le 23 juin ». Des faits corroborés par d’autres acteurs du secteur. Une poignée de jours plus tard, les statistiques officielles ont confirmé cette tendance.

Les investissements des entreprises britanniques ont reculé de janvier à mars 2016, comme au trimestre précé- dent. Une première depuis les difficultés enregistrées en 2012 après le lancement de la politique d’austérité du Premier ministre David Cameron. Signe que le deuxième trimestre 2016 sera du même acabit, le responsable du portefeuille des Finances, George Osborne, a revu sa pré- vision de croissance pour l’année 2016 largement à la baisse, de 2,4 % à 2 %. « Ce sont autant d’indications claires de la peur que ressentent les entreprises vis-à-vis des effets d’un Brexit », estime Joshua Mahony, analyste de la société de services financiers IG. «Et elles vous font vous demander à quoi la croissance et les investissements ressembleront si le RoyaumeUni devait quitter l’Union européenne…» L’économie britannique ralentit, mais les grands patrons commencent seulement à élever la voix pour exprimer leur appréhension. Tous craignent en effet, et en premier lieu le secteur des services, que leur prise de position contre le Brexit soit montée en épingle par la presse tabloïd et leur aliène de nombreux clients. Surtout que leur avis est loin d’être fédé- rateur. En direct à la télévision, Stuart Rose, l’ancien président du groupe Marks & Spencer, nommé leader du groupe de campagne officiel favorable au maintien au sein de l’UE, a admis il y a quelques semaines qu’une réduction de l’immigration entraînerait une baisse de la maind’œuvre et potentiellement une hausse des salaires. Avant d’ajouter : « Mais ce n’est pas forcément une bonne chose. »

Depuis, Stuart Rose n’est quasiment pas réapparu dans les médias. Le camp du maintien n’a sans doute pas apprécié que, par cette déclaration sortie du fond de son cœur, il ait exposé l’écart plus que jamais grandissant, mais inavouable, entre les objectifs d’une partie du patronat britannique et les souhaits de la majorité de la population. Alors que le rejet de l’immigration européenne a été l’une des raisons centrales de l’organisation du référendum, la plupart des entrepreneurs bénissent l’élargissement de l’UE et la liberté de mouvement des travailleurs au sein des 28pays membres. Depuis 2004, 1,46million de citoyens d’Europe centrale et orientale supplémentaires vivent au RoyaumeUni. « Les études estiment que ces migrants ont augmenté la main-d’œuvre nationale de 2 %, un chiffre loin d’être marginal», rappelle Douglas McWilliams, président du Centre de recherche des affaires et du commerce, un think tank très en vue. « Leur arrivée a transformé l’économie britannique et a maintenu le coût du travail à un niveau bas. » Un effet guère apprécié des travailleurs locaux. Les entreprises étrangères basées sur le sol britannique sont encore plus hésitantes à donner leur point de vue. Opérant principalement dans des secteurs de pointe, où travaille une main-d’œuvre qualifiée, elles ne sont pas concernées par la question de l’immigration, peu ou sous-qualifiée. Les Britanniques ne seront pas épargnés par les conséquences d’un Brexit. La bande de David Cameron ne cesse de le leur rappeler. Elle a tout d’abord martelé qu’une sortie de l’UE entraînerait une baisse sur deux ans de 3,6 % du PIB. Concrètement, chaque foyer dépenserait chaque année 220 livres (280 euros) de plus pour son alimentation en raison de la dépréciation de la livre sterling et de l’imposition de tarifs douaniers par l’UE. Les retraités perdraient entre 18 000 et 32 000 livres (23 000 et 41 000 euros) à cause de la baisse des prix de l’immobilier et de la valeur de leurs fonds de pension. Même le coût d’une semaine de vacances pour une famille de quatre personnes augmenterait de 230 livres (292 euros). Souci: ces affirmations reposent sur des supputations sans aucune substance, sur l’idée que les Vingt-sept se lèveraient comme un seul homme pour punir le Royaume-Uni d’avoir osé s’extraire du marasme européen. Et qu’au final les négociations avec l’UE traîneraient tellement que le pays se retrouverait dans deux ans dans un vide juridique, isolé et ignoré par le reste du monde.

Cette vision agace le député conservateur et ancien ministre des Affaires européennes (1994-1997) David Davis, l’un des eurosceptiques les plus médiatiques. «Jamais les pays de l’UE ne mettront en place des barrières tarifaires qui limiteraient les échanges commerciaux et qui, surtout, se retourneraient contre leurs entreprises, assène cet ancien homme d’affaires. Mercedes-Benz par exemple voudra toujours vendre des voitures sur le sol britannique, et le groupe fera le nécessaire pour que les dirigeants politiques allemands ne handicapent pas ses ventes. Tous ceux qui crient au loup nous promettaient déjà l’enfer il y a dix ans si nous n’adoptions pas l’euro. Cela en dit long sur la crédibilité de leurs menaces. » Malgré toute l’incertitude qu’engendrerait un Brexit, il est difficile de lui donner tort.

15/05/2016

Ventes d’armes


Lobbying actif


En remportant le contrat de sous-marins à l’Australie, le gouvernement montre le succès de son aggressivité commerciale en matière
de défense.

C'est le 25 avril que le Premier ministre australien, Malcolm Turnbull, a appelé François Hollande pour lui annoncer que la DCNS avait remporté un contrat d’armement d’un montant de près de 35 milliards d’euros. Ce coup de théâtre vient conclure une campagne menée tambour battant par la France afin de remporter un appel d’offres pour la construction de douze sous-marins. Un effort récompensé par l’annonce que la DCNS a coiffé sur le poteau son rival allemand, ThyssenKrupp AG.

Les Japonais ayant apparemment jeté l’éponge le mois dernier, il ne restait donc que deux candidats, dont les méthodes n’auraient pu être plus différentes. Alors que la campagne française a eu pour apothéose un dîner officiel organisé par Hollande en l’honneur du gouverneur général, sir Peter Cosgrove [représentant de la reine Elisabeth en Australie], l’Allemagne a délégué la mission de représentation à l’équivalent d’un secrétaire d’Etat. Tandis que Hollande a sans aucun complexe défendu la cause des constructeurs français, le gouvernement de Merkel s’est montré un peu plus discret, préférant éviter de mentionner la question par peur de la réaction hostile de l’opinion publique face à ce qui aurait été le plus gros contrat d’armement jamais remporté par l’Allemagne.

Industrie vitale. “Les Français ont aligné François Hollande et un bus rempli de généraux et de juristes”, a déclaré Frank Haun, PDG du constructeur de chars allemand Kraiss-Maffei Wegmann, lors d’une conférence qui s’est tenue à Berlin l’automne dernier. “Moi, j’arrive en Smart accompagné d’un ambassadeur, et encore, quand j’ai de la chance.” L’Allemagne a confié la défense de l’offre de ThyssenKrupp à Uwe Beckmeyer [équivalent du secrétaire d’Etat au Commerce extérieur], qui, l’an- née dernière, a emmené avec lui une délégation en Australie. Son opération fait pâle figure comparée au déploiement français, Le Drian ayant visité le pays pendant près d’une semaine en février, déposant des gerbes devant les monuments aux morts et distribuant des médailles aux anciens combattants. Au cours des deux dernières années, des ministres français se sont rendus au moins à quatre reprises aux antipodes pour vanter les mérites de l’offre de la DCNS, une entreprise d’Etat.

D’un point de vue économique, cette vigoureuse campagne a largement porté ses fruits. Les exportations militaires françaises ont atteint le chiffre record de 16 milliards d’euros en 2015, soit deux fois plus qu’en 2014 et quatre fois plus qu’en 2012. L’Allemagne, elle, a chuté de la troisième place (en 2010) à la cinquième (en 2015) au classement des exportateurs d’armement, selon les informations de l’International Peace Research Institute de Stockholm (Sipri). La France est l’un des deux pays qui l’ont dépassée. Ce lobbying français s’explique avant tout par le fait que la défense est un des secteurs industriels les plus importants du pays, où il représente 165 000 emplois. Ce chiffre devrait d’ailleurs dépasser les 200000 d’ici à 2018, d’où le caractère stratégique du secteur dans la lutte contre le chômage, supérieur à 10 %. On peut effectivement avancer que l’industrie de la défense n’est pas aussi vitale en termes d’emplois pour l’Allemagne, qui peut compter sur une industrie automobile écrasant tous les autres secteurs.

De plus, le processus d’approbation des contrats d’armement n’est pas le même dans les deux pays. En Allemagne, les exportations d’équipements militaires sont soumises à des règles strictes, liées pour l’essentiel au passé sanglant du pays au XXe siècle. Il est déjà arrivé que le Conseil de sécurité du gouvernement bloque ou retarde des licences à l’exportation, même quand il s’agissait de la fourniture de composants secondaires. Par conséquent, certains Etats ont placé les producteurs
allemands sur une liste noire, et les concurrents internationaux de ces derniers n’hésitent plus à présenter leur matériel comme “garanti sans composants allemands”. En France, en revanche, les contrats d’armement ont approuvés par un comité dont les membres sont souvent ceux qui se chargeront de la promotion desdits contrats, à commencer par le ministre de la Défense en personne. “En France, la société civile ou le Parlement ne se soucient pas trop des exportations militaires, donc il y a peu de contraintes”, commente Pieter Wezeman, spécialiste du commerce des armes au Sipri. “L’opinion publique soutient les exportations, car elles sont profitables à l’industrie et à l’emploi. En Allemagne, c’est le contraire.”

Légion d’honneur. Le département de la défense du groupe Airbus est de ceux qui en ont fait l’amère expérience. Il avait par exemple été choisi pour fournir des systèmes d’acquisition de cibles destinés à des véhicules blindés pour l’Arabie Saoudite en 2012, mais l’approbation a traîné en longueur, et la société a fini par être exclue de l’appel d’offres. Un contrat de 600 millions d’euros lui est ainsi passé sous le nez. A l’époque, Tom Enders, PDG d’Airbus, avait dénoncé le comportement “grotesque” du gouvernement allemand.

Ces différences se font également jour dans d’autres appels d’offres. Si l’Allemagne refuse de vendre des chars Leopard 2 à l’Arabie Saoudite depuis les années 1970, Hollande et son Premier ministre se sont rendus dans le pays au cours des douze derniers mois pour soutenir des propositions françaises dans tous les secteurs, des missiles aux drones, en passant par les bâtiments de combat et les hélicoptères. Le prince héritier saoudien Mohammed ben Nayef s’est vu décerner l’une des décorations les plus prestigieuses de France, la Légion d’honneur, bien que d’aucuns aient rappelé à Paris que les deux pays ne partageaient pas les mêmes valeurs dans le domaine des droits de l’homme.

En ce qui concerne les sous- marins, les Français l’ont aussi emporté “parce qu’ils construisent des navires plus grands et à plus grand rayon d’action, ce que recherchait l’Australie, ajoute Wezeman. Les Allemands ont tendance à en construire de plus petits. Ils se sont engagés à en fournir des modèles plus imposants, mais ils n’en ont pas produit depuis la Seconde Guerre mondiale.”

Aucun scrupule : La France exporte ses armes avec moins de complexes que l’Allemagne, grince le journal conservateur comme c'est tres souvent le cas dans les contrat d'armement, ce n'est pas la meilleure technologie mais la politique qui a permis de l’emporter. Car, contrairement à l’Allemagne, le gouvernement français n’hésite pas à servir de représentant de commerce à l’industrie militaire. Un art dans lequel le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, excelle particulièrement. C’est aussi à lui qu’il faut attribuer le fait que l’avion de combat Rafale ait obtenu, près de trente ans après son premier vol, ses premiers contrats à l’exportation. Les [dirigeants] allemands, eux, se font généralement discrets quand il s’agit de soutenir des contrats d’armement, afin de ne pas se retrouver sous le feu des critiques.


Tradition. Des scrupules dont Paris ne s’embarrasse guère. L’industrie militaire est la fierté du pays, un secteur clé qui mérite d’être protégé, un facteur de survie pour l’indépendance française vis- à-vis de la technologie américaine. Du reste, l’intervention de l’Etat dans l’économie est une tradition depuis Colbert, ministre de l’Economie de Louis XIV.

Il ne faut donc pas non plus s’étonner que l’Etat ait des parts dans des entreprises du secteur de la Défense comme la DCNS ou Thales, l’autre grand actionnaire du constructeur naval. Si cela peut paraître impensable à beaucoup en Allemagne, du point de vue des Français les membres du gouvernement ont presque pour devoir de vanter les produits nationaux lors de leurs déplacements à l’étranger, et de promettre de nouveaux investissements dans les pays intéressés pour décrocher des commandes. Nul doute que le contrat des sous- marins australiens a dû faire l’objet du même genre d’échanges de bons procédés.


10/05/2016

Lobbying

LE LOBBYISTE QUI FAIT TREMBLER L’INDUSTRIE DU TABAC



British American Tobacco
Au Stade de France
le 30 mai 2015. Dans la loge d’Yves Trévilly (debout à droite), Jean-Vincent Placé vient saluer Dominique Strauss-Kahn(dedos). 




British American Tobacco
Ci-contre, le même soir, Yves Trévilly et DSK. 



Longtemps, Yves Trévilly a défendu les intérêts de l’industrie du tabac. Il les combat aujourd’hui. Ce lobbyiste a mis son important réseau politique au service d’une multinationale suisse qui rêve de décrocher un marché prometteur : la traçabilité des cigarettes. L’histoire d'une revanche personnelle, mais aussi d'une guerre industrielle aux enjeux colossaux

Stade Saint-Denis, 30 mai 2015. Dans les loges du Stade de France, Dominique Strauss- Kahn et sa compagne, Myriam L’Aouffir, roucoulent devant la finale de la Coupe de France opposant le Paris Saint-Germain à Auxerre. Le couple, qui s’affiche peu en public, est entouré ce soir-là d’un aréopage de journalistes et de personnalités politiques : le député (LR) Thierry Solère, le communicant Patrick Dray, ancien conseiller de François Fillon aujourd’hui au service de Gérard Larcher, le président du Sénat. Ou encore Jean-Vincent Placé venu les saluer à la mi-temps. Le match est rasoir, alors on s’égaye en buvant du bon vin. Dans la loge, un homme au front dégarni, tempes grisonnantes, chemise griffée à ses initiales, va de convive en convive, chuchotant un mot à l’oreille de l’un, échangeant un rire complice avec un autre. Il est le maître de cérémonie de la soirée, la puissance invitante. Pour le grand public comme pour les photographes trop heureux de pouvoir « mitrailler » DSK, c’est un inconnu. Pour les autres... Yves Trévilly – c’est son nom – préfère naviguer en coulisses. Son métier l’exige. Il est l’un des lobbyistes les plus redoutés à Paris, frayant depuis vingt ans avec de nombreux responsables politiques, droite et gauche confondues. Une grande gueule, séducteur et cynique, mais aussi un fin connaisseur des arcanes législatifs. Recevoir DSK dans sa loge, qu’il loue 250 000 euros à l’année, c’est un « coup », une manière pour lui de montrer l’étendue de son influence, de ses réseaux.

Yves Trévilly le jure : on ne parle pas de business ni de politique devant un match de foot. On passe seulement une bonne soirée entre copains. Pas question, dit-il, de s’épancher sur les projets de son employeur, Sicpa, une multinationale suisse partie en guerre contre l’industrie du tabac. Spécialisée dans les encres infalsifiables des billets de banque, Sicpa rêve de remporter un marché qui s’annonce florissant : la traçabilité des cigarettes, autrement dit le marquage des paquets afin de lutter contre le marché noir. Accusés d’alimenter ce commerce illicite, les fabricants, eux, défendent leur propre système de traçabilité, dont l’efficacité est contestée. Sicpa n’a pas recruté Trévilly par hasard. Car s’il y a un sujet que notre homme connaît sur le bout des doigts, c’est bien le tabac. De 2005 à 2012, il fut le lobbyiste en France de British American Tobacco (BAT), un des plus importants fabricants au monde (Lucky Strike, Pall Mall, Dunhill...). C’est lui qui démarchait les députés, les conseillers dans les ministères, les hauts fonctionnaires des Douanes, plaidant contre l’augmentation des prix du tabac, s’opposant à l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Distillant, quand il le fallait, des éléments de langage aux journalistes. Invitant tout ce beau monde à Roland-Garros ou – déjà – dans la loge que BAT louait alors au Stade de France et que Trévilly reprendra à son compte après son départ. Sous son parrainage, chaque année, était organisé le traditionnel banquet du Club des Parlementaires Amateurs de Havanes, au cours duquel trinquaient, dans une éthylique et joyeuse connivence, hommes politiques et industriels du tabac.

Il y a bientôt quatre ans son histoire d’amour avec le monde du tabac s’est achevée dans le bruit et la fureur. Trévilly est alors passé de l’autre côté, attaquant brutalement ce qu’il défendait quelques mois plus tôt, révélant à qui voulait l’entendre les secrets des cigarettiers : sur la fiscalité, la fixation des prix, la collusion entre élus et fabricants. Peu banale, son histoire est d’abord celle d’un transfuge, d’une revanche personnelle. Elle raconte aussi un métier, celui de lobbyiste, et une bataille industrielle, aux enjeux qui se chiffrent en milliards d’euros. Celle-ci s’est achevée en décembre dernier à l’Assemblée nationale par le vote d’un amendement qui risque de coûter cher aux fabricants de tabac. Yves Trévilly y a joué un rôle déterminant, mettant son savoir-faire et son carnet d’adresses au service de Sicpa. Son passé, son tempérament, son envie d’en découdre, ont ajouté une touche passionnelle à l’affaire. Pour les fabricants, il est devenu un homme à abattre. Des agences de communication ont même été mandatées pour faire circuler un dossier sur les conditions houleuses de son départ de chez BAT.

C’est après plusieurs relances qu’Yves Trévilly accepte de nous rencontrer dans un café. Longue silhouette un peu voûtée, gorge nouée, l’homme ne ressemble guère au lobbyiste flamboyant décrit par ses amis. Il nous accuse aussitôt d’être à la solde des fabricants de tabac : « Vous avez des commanditaires qui vous commandent un papier, vous le faites [...] Aujourd’hui, la seule entreprise qui a mis en place un système de traçabilité indépendante, c’est Sicpa. Il faut donc salir la boîte qui semble la mieux placée pour répondre à des marchés et les obtenir. » Sur ses relations avec le monde politique, Trévilly se montre en revanche moins disert. Elles sont pourtant parfois très directes et sans ambiguïtés comme le montre cet échange de mails d’août 2012 dont « l’Obs » a eu connaissance. Le destinataire s’appelle François Kalfon, alors responsable des études d’opinion au PS et cofondateur d’une société de conseil, Majorelle, avec sa compagne de l’époque, la communicante Anne Hommel. Trévilly, qui travaille encore pour BAT, demande à Kalfon de passer une note sur le paquet neutre à la ministre de la Santé, Marisol Touraine. Réponse de Kalfon : « Je m’en occupe... » Aussitôt, Trévilly en réfère à la présidente de BAT : « Notre lobbyiste fait passer la note à Marisol Touraine. » Pourquoi donc ce cadre socialiste accepte-t-il de jouer les intermédiaires ? Tout simplement parce qu’il vient de signer pour le compte de sa petite entreprise un contrat de six mois avec... BAT, pour un montant de 24 000 euros hors taxe. Au téléphone, François Kalfon confirme : « J’avais une mission d’affaires publiques pour British American Tobacco. Ça n’a pas été très concluant. La seule chose que j’ai faite, c’est d’organiser deux ou trois rendez-vous avec des membres du cabinet du ministre du Budget sur le prix du tabac. [...] N’étant pas parlementaire, il n’y avait pas de conflit d’intérêts entre mes fonctions et cette mission. »

« Pourquoi Kalfon ?, demande-t-on aujourd’hui à Trévilly.

– Parce qu’il fallait faire appel à quelqu’un.

– Parce que la gauche venait d’arriver au pouvoir, qu’il avait des contacts, beaucoup de réseaux, qu’il pouvait vous aider ?

– Ce qui serait la définition d’une action de lobbying. »

A cette époque, Yves Trévilly est au sommet de sa carrière. La victoire des socialistes aux élections n’inquiète pas trop cet homme de droite qui fut, sous Chirac, chef de cabinet du ministre des PME Renaud Dutreil. Au Stade de France, la loge BAT ne désemplit pas, pour les matchs des Bleus comme pour les concerts de Madonna, de Johnny ou de Coldplay. Parmi les invités plus assidus, le socialiste Julien Dray et le sénateur Jean-Vincent Placé. Trévilly a alors 48 ans ; enjôleur, le verbe facile, il est riche – un salaire mensuel brut de 26 000 euros –, se sent puissant. Trop ? Le voilà qui sort de l’ombre dans laquelle aiment frayer les lobbyistes. Il accorde des entretiens au « Monde », à Canal+. Déclare n’éprouver « aucun respect pour les associations antitabac qui bouffent à tous les râteliers et sont financées par les laboratoires pharmaceutiques ». La chute n’en sera que plus brutale. Le 30 septembre, une lettre anonyme met en cause son comportement vis-à-vis de ses collègues. D’autres cadres sont également visés. Une enquête interne est diligentée et, un mois plus tard, Trévilly est licencié pour faute grave. Sur ce sujet, ni BAT ni Trévilly ne souhaitent s’exprimer, l’affaire étant en cours devant les prud’hommes. Devant nous, Trévilly se contente de dire qu’il a « adoré sa vie chez BAT [...] Je n’ai aucune revanche à prendre, je suis un mec hypercool ».

Viré du jour au lendemain, Trévilly est à terre, mais l’homme a de la ressource et, surtout, des fidélités à revendre. Dès janvier 2013, il crée une société de conseil, Sélénor, et se rapproche de Sicpa. Présente dans 80 pays, cette multinationale refuse de dévoiler ses résultats financiers mais on estime son chiffre d’affaires à plus de 1 milliard d’euros. « C’est une société qui n’aime pas la publicité. Elle travaille dans l’ombre, à huis clos. Pour approcher les décideurs publics, ses méthodes de lobbying peuvent parfois être agressives », explique un ancien cadre. Au Brésil, la firme est soupçonnée d’avoir versé des pots-de-vin afin d’obtenir le renouvellement d’un contrat. Une enquête a été ouverte l’an passé. Pour Sicpa, le marché français de la traçabilité pèse « seulement » 80 millions d’euros mais, poursuit notre source, « la France est un cheval de Troie. Si les pouvoirs publics choisissent Sicpa, les autres pays européens suivront ». Recruter Trévilly comme directeur général de sa filiale française, c’est, pour Sicpa, s’assurer un réseau d’élus capables de relayer ses arguments. Et contrer ceux des fabricants de tabac et de leurs nombreuses agences de lobbying.

Sur ce transfert peu banal, Trévilly use d’une comparaison un rien présomptueuse : « C’est comme passer du Milan AC au PSG quand on s’appelle Ibrahimovic et qu’on va rejouer contre le Milan AC [...] J’ai refusé énormément de sollicitations pour dénoncer un certain nombre de choses [...] Aujourd’hui, ils se disent : “Mon Dieu, ce garçon est parti avec tous nos secrets et il est en train de nous niquer.” C’est faux ! » La mission de Trévilly est simple : faire adopter par la France le système de traçabilité voulu par Sicpa. « Il y a deux façons de faire du lobbying, argumente Trévilly. Un lobbying à la kalachnikov, des gens qui multiplient les rendez-vous. Je n’ai jamais été adepte de ça. Moi, je sens les choses, je vois les trucs qu’il faut faire, j’essaie de viser les bonnes personnes... »

A l’Assemblée nationale, certains revirements ne passent pas inaperçus. Présenté comme un proche de l’industrie du tabac, le député Thierry Lazaro (LR) dépose subitement un amendement favorable au marquage des paquets de cigarettes. Faut-il y voir la main de Trévilly, dont il fut l’invité au Stade de France ? « Je le connais depuis de nombreuses années, admet Lazaro. Son père adoptif, le chanteur Michel Delpech, est alors atteint d’un cancer. On la voit poser poitrine dénudée contre le cancer du sein. On sait moins qu’elle a monté depuis sa propre société de lobbying, Errata, ou qu’elle est « apporteuse d’affaires », selon ses dires, pour une entreprise d’intelligence économique. A « l’Obs », Pauline Delpech jure que son combat contre le tabac est désintéressé : « Vous pouvez regarder partout, je n’ai aucun lien financier avec Yves Trévilly ou avec Sicpa. Je veux faire du mal aux cigarettiers. La traçabilité indépendante va enrayer le marché parallèle qui touche les adolescents. » Trévilly aussi dément tout lien professionnel avec Delpech : « Elle n’est pas mon “ambassadrice”. » Et pourtant, avec un culot monstre, Pauline Delpech parvient à s’introduire dans tous les cénacles où il est question de cigarette. Elle sollicite des parlementaires anti- tabac comme la députée socialiste Michèle Delaunay, afin de leur présenter Yves Trévilly. « Trévilly est venu me voir il y a un an avec Pauline Delpech, raconte Delaunay. Il m’a expliqué par quels mécanismes augmenter la fiscalité au détriment des cigarettiers. Il ne m’a pas dit qu’il travaillait pour Sicpa. » Un autre élu écologiste décrit la technique de Pauline Delpech : « Démarcher des parlementaires de tout bord grâce à son côté sympathique. Elle m’a fait rencontrer Yves Trévilly. Elle le présente comme quelqu’un qui vient de l’industrie du tabac et qui a des infos à donner. Il ne veut pas apparaître mais il dit : “Si vous avez besoin, je vous aiderai.” » La jeune femme a ses entrées partout : auprès du conseiller social de l’Elysée, Michel Yahiel, du député européen Philippe Juvin (LR) ou de son collègue Gilles Pargneaux (PS), à l’initiative, avec elle, d’un groupe de travail qui vise notamment à promouvoir « la traçabilité indépendante des produits du tabac ».

Mais c’est surtout auprès de Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, que Pauline Delpech va jouer un rôle décisif. De par sa fonction, Le Roux est le député le plus influent de l’hémicycle. Jusqu’alors, il ne s’était jamais intéressé au tabac. Tout change à partir de sa rencontre avec Delpech. « Elle est la première à m’avoir évoqué les enjeux du protocole de l’OMS [l’Organisation mondiale de la Santé qui, en 2012, pose le principe d’une traçabilité indépendante des fabricants] », reconnaît Le Roux. Il dit avoir reçu la jeune femme « trois ou quatre fois » dans son bureau et lors d’un déjeuner. Delpech, elle, parle « d’une dizaine de rendez-vous et de deux déjeuners ».

« Vous êtes-vous posé la question des liens entre Pauline Delpech et Yves Trévilly, qui agit, lui, au nom d’intérêts industriels ? demande-t-on à Le Roux.

– Non. Ce n’est pas mon problème, répond-il sèchement. La traçabilité est un sujet majeur. L’industrie du tabac est la principale responsable de l’organisation de la contrebande. »

Lors des débats à l’Assemblée, le patron des députés PS devient le plus fervent défenseur non seulement d’une traçabilité indépendante (un principe que peu de parlementaires contestent), mais surtout d’une mise en place immédiate de ce système, ce qui aurait pour effet de favoriser Sicpa, un des seuls acteurs à pouvoir tout de suite proposer une solution clé en main. Au cours de l’année 2015, Bruno Le Roux intervient au moins à sept reprises sur cette question ! Quitte, ce qui est très rare, à s’opposer au gouvernement, celui-ci préférant s’en remettre à une solution européenne. Peu suspecte de complaisance envers l’industrie du tabac, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, s’étonne de cette volonté d’aller si vite. « Je ne peux qu’être favorable à l’objectif que vous poursuivez, mais je suis très perplexe quant à la faisabilité concrète et au caractère juridiquement opposable des dispositions que nous serions amenés à adopter [...] En droit pur, l’avis du gouvernement doit être défavorable », explique-t-elle devant les députés le 3 avril 2015. Quelques mois plus tard, c’est au tour de Christian Eckert, secrétaire d’Etat chargé du Budget, de dire non à l’amendement défendu par Bruno Le Roux. « Je n’ai absolument aucun lien ni avec un quelconque lobby défenseur ou non de l’industrie du tabac, ni avec un groupe industriel qui souhaiterait promouvoir tel ou tel dispositif », ose même lancer Eckert, allusion à peine voilée à Sicpa. Pas de quoi refroidir les ardeurs de Le Roux qui, dès le lendemain, affirme avoir « saisi le président de la République afin qu’il réunisse les présidents de groupe le plus rapidement possible et nous dise comment il entend mettre en œuvre ce système de lutte contre le trafic ».

Un tel activisme ne passe pas inaperçu. Un jour, le député Dominique Lefèvre (PS) apostrophe Le Roux : « Fais gaffe Bruno, tu n’as pas à te faire le porte-parole d’intérêts industriels ! » « Ça n’a rien à voir avec ça ! », répond Le Roux. Spécialiste des questions fiscales, Charles de Courson (LR) se montre lui aussi dubitatif : « Parfois, on se demandait ce que Le Roux venait faire en séance. Il a quand même été très insistant. » Moins diplomate, un sénateur assure : « Bruno Le Roux est proche de Delpech, laquelle est dans la main de Trévilly. »

Très actif à l’Assemblée, Le Roux se montre moins pressé quand il s’agit de nous rencontrer. Nous devons lui envoyer une liste de questions, notamment sur ses liens avec Pauline Delpech, pour qu’il nous reçoive sur le-champ. Dans son bureau, le président du groupe PS fanfaronne : « Personne ne fait pression sur moi ! Pauline Delpech ne tient ni mes idées ni ma main [...] Elle ne m’a jamais demandé de faire quelque chose. » Il concède cependant connaître Trévilly et même, une fois, avoir « passé une tête » dans sa loge du Stade de France, où il dit se rendre régulièrement en tant que député de Seine-Saint-Denis. « Trévilly est quelqu’un de sympathique, soutient-il. J’ai pu boire des verres avec lui de manière amicale, mais pas une seule fois il n’a cherché à me contacter sur la question de la traçabilité. »

Le 11 décembre 2015, l’article 569 du Code général des Impôts, qui organise le système actuel de traçabilité, est abrogé, comme le souhaitait Bruno Le Roux – et Sicpa –, ouvrant la voie au lancement d’un appel d’offres pour tracer les cigarettes vendues en France. « Ce n’est pas uniquement grâce à moi que Bruno a porté ce combat sur la traçabilité, mais en partie, oui », glisse avec un grand sourire Pauline Delpech. Il y a trois semaines Sicpa annonçait son alliance avec le groupe français Capgemini, levant le dernier obstacle à la réussite de sa stratégie ( jusqu’alors, ses détracteurs lui reprochaient de ne pas incarner une « solution française », autrement dit de ne pas créer d’emplois dans l’Hexagone). Pour Trévilly, c’est une sacrée revanche, et qu’importent ses motivations, ses méthodes – les mêmes que lorsqu’il travaillait pour le tabac –, puisque, à la fin, les cigarettiers ont perdu. «Yves,son parcours est follement romanesque, s’enthousiasme Pauline Delpech. On dirait un film. Sicpa a compris qu’il fallait le récupérer. Les cigarettiers doivent s’en mordre les doigts de l’avoir laissé partir. » De quoi le conforter dans sa conviction qu’il est le meilleur lobbyiste de Paris. « Parmi tous les gens que vous avez rencontrés, je n’imagine pas qu’on vous ait dit “Trévilly est un mauvais”, dit-il. Trévilly, on vous a dit soit qu’il est très bon, soit qu’il est excellent. » Mais certainement pas le plus modeste.