15/03/2018

Anvers, capitale européenne de la cocaïne consommée en Europe

Anvers, capitale européenne de la drogue
Anvers, capitale européenne de la drogue

Anvers devient la Colombie de l’Europe. Car c’est bien par cette ville portuaire que transite plus de la moitié de la cocaïne consommée en Europe. Une situation à laquelle une nouvelle unité de police doit remedier. La cible principale du « plan du Fleuve » (Stroomplan) : les barons de la drogue, pour qui « la fête » sera bientôt « finie », à en croire les différentes autorités désormais réunies sous le nom de Kali-Team. Un nom qui fait notamment référence à la ville colombienne de Cali, où les cartels de la drogue sont parvenus à infiltrer tous les niveaux.

Si l’appellation du nouveau groupe d’action laisse à désirer en termes de communication – Anvers n’étant pas réellement comparable à Cali – son objectif a le mérite d’aller plus loin que la dénommée war on drugs menée par le bourgmestre, Bart De Wever (N-VA), contre les petits dealers anversois. Désormais, les services concernés collaboreront pour s’attaquer, aussi, au blanchiment d’argent, aux flux financiers illicites et au trafic international. Polices, parquets, douanes et entreprises portuaires devront œuvrer pour mettre fin aux scènes hollywoodiennes dont la métropole est le théâtre, allant des appels publics à éliminer des informateurs de la police aux règlements de compte perpétrés en plein jour.

La mission n’est pas sans obstacle. D’après certains experts, elle aurait même de sérieux risques d’échouer. Au vu de la persévérance des cartels, le Stroomplan pourrait déplacer le trafic vers d’autres points de transit. Le projet néglige en outre un pan considérable de la problématique, à savoir
celui des consommateurs. Ces derniers se trouvent dans toutes les couches de la population, notamment parmi les avocats, les banquiers, les douaniers ou les policiers qui, comme à Cali, sont parfois tentés d’offrir leurs services à de riches criminels. Actuellement, aucune stratégie n’est prévue pour comprendre ce qui pousse les citoyens à consommer, et ce qui pourrait les en dissuader. « Je ne peux qu’appeler les consommateurs à ne pas le faire », avait déclaré Bart De Wever au micro de la VRT. Des propos un peu légers, alors qu’une véritable aide structurelle aux usagers pourrait renforcer l’efficacité d’une politique répressive en cassant la demande de cocaïne qui pérennise le marché. Une baisse du nombre d’acheteurs affaiblirait également l’économie informelle qui, d’après un récent rapport d’enquête, aurait surpassé l’économie légale dans le district de Borgerhout.

La lecture politique du Stroomplan dévoile aussi une démarche électorale, à quelques mois des élections communales. Flanqué de trois ministres et d’un secrétaire d’Etat, le leader de la N-VA s’est en quelque sorte approprié le plan d’action fédéral, tout en embarquant le CD&V et l’Open VLD dans sa campagne sécuritaire. Bart De Wever s’est, dans la foulée, acheté un temps précieux, alors que les résultats de sa guerre contre la drogue demeurent invisibles, et que les critiques fusent. Le « plan du Fleuve » l’aidera peut-être à mieux déceler les financements locaux suspects. Mais, en coulisse, le drame social alimenté par les clans et les caïds est déjà profondément enraciné. Un gouffre dans lequel s’enfonce la jeunesse des quartiers défavorisés, et auquel les contrôles fiscaux et douaniers ne changeront rien, en l’absence de chances d’ascension sociale par la voie légale.

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